Depuis déjà plusieurs décennies, la République centrafricaine (RCA) connaît des épisodes sanglants. Ce pays d’Afrique centrale goûte maintenant à un conflit aux motifs religieux. Chrétiens vs Musulmans, Musulmans vs Chrétiens.
Maintenant, le haut fonctionnaire spécial de l’ONU, le sénégalais Adama Dieng chargé sur la prévention du génocide craint pour le pire. «Nous voyons des groupes armés qui tuent sous prétexte de leur religion », a déclaré aux journalistes M. Dieng dans un breffage au Conseil de sécurité de l’ONU vendredi. « Mon sentiment est que cela va finir avec les communautés chrétiennes et les communautés musulmanes qui s’entretueront. Ce qui signifie que si nous n’agissons pas maintenant et de manière décisive, je n’exclus pas la possibilité d’un génocide. »
Ce vaste pays riche en minerais de 4,6 millions de personnes a connu de terribles dirigeants dans le passé. Jean- Bedel Bokassa a régné pendant une décennie après sa prise de pouvoir en 1966. Il se proclama Empereur lors d’une cérémonie sur le modèle du sacre de Napoléon. Il a été honoré par les dirigeants étrangers de Kadhafi au président français, Valéry Giscard d’ Estaing.
La situation actuelle est le résultat d’une attaque menée par les rebelles du Seleka qui se sont emparés de la capitale, Bangui, en mars 2013, renversant le président François Bozizé. Depuis lors, l’état déjà fragile vacille vers l’anarchie.
Le Seleka, dirigé par Michel Djotodia, né dans le nord-est du pays dépeuplé et à majorité musulmane, s’est autoproclamé président le 24 mars 2013. Un grand nombre de la population – en particulier dans l’ouest de la RCA – sont chrétiens. Le conflit actuel a pris un caractère nettement religieux.
Cela se reflète dans une enquête menée par Amnesty International, qui contient des rapports détaillés sur les attaques contre les communautés chrétiennes. Un principal leader chrétien est cité disant que lui et d’autres chefs religieux avaient exprimé leurs craintes aux autorités de persécutions religieuses. « Il a dit que la direction Seleka fait peu pour empêcher les soldats de viser les institutions chrétiennes. Les perceptions et les craintes que les factions au sein Seleka persécutent les non-musulmans en RCA doivent être abordées de toute urgence afin d’éviter les conflits religieux », prévient Amnesty.
Idem pour les chrétiens. Ils se sont regroupés en factions pour s’attaquer à des gens de confessions musulmanes. Une violence froide et aveugle. Les gens sont mis en morceaux, sans autre forme de procès. Les deux communautés sont déchirées, aveugles aux souffrances de l’autre.
Médecins Sans Frontières (MSF) rapporte que des dizaines de milliers de personnes ont fui leurs maisons, craignant de nouvelles attaques. À Bossangoa environ 28.000 personnes ont trouvé refuge à la mission catholique. Elles redoutent de retourner dans leurs maisons et les champs, même si elles sont à quelques centaines de mètres plus loin.
La descente dans le chaos se déroule en dépit de la présence des troupes internationales. La France a maintenu une faible présence dans la capitale depuis de nombreuses années, mais les 410 soldats sont là uniquement pour protéger leurs intérêts : l’ambassade, l’aéroport et les ressortissants français. Selon Amnesty Internationale le nombre des autres forces présentes s’élève à près de 1000 hommes. Ils font face à des rebelles Seleka, dont le nombre a été grossi depuis qu’ils ont pris Bangui de 5000 à environ 20.000. Mais même les ordres du président Djotodia auraient peu de poids, et les arrestations arbitraires et les détentions illégales se poursuivent en toute impunité.
La difficulté pour l’Union africaine et les Nations Unies est qu’il y a peu de pays disposés à fournir un appui extérieur. Le Burundi a proposé d’envoyer 500 soldats, mais d’autres États africains ont été réticents à engager leurs forces armées à ce bourbier.
Le 2 novembre dernier, le déploiement de la Mission de soutien à la Centrafrique (MISCA) a été accéléré par Commission de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). Un décaissement de 20 milliards de FCFA (un peu plus de 40 M$) a été attribué par le groupe formé de six états (Cameroun, République centrafricaine, République du Congo, Gabon, Guinée équatoriale et le Tchad) pour amener un effectif de 3600 hommes dans l’ex-colonie française.
Afrique du Sud serait un contributeur de troupes évident, mais il est peu probable d’avoir lieu. À la veille du coup d’État, Le Seleka a tué au moins 13 soldats sud-africains. Leurs morts ont donné lieu à des critiques acerbes de la gestion du gouvernement sud-africain de la mission et en avril de cette année, le président Jacob Zuma arrachait les forces restantes hors du pays.
Le président français François Hollande et son hôte l’Afrique du Sud ont discuté de la situation en République centrafricaine à Pretoria le mois dernier. «Nous [Afrique du Sud ] convenons que nous devons faire quelque chose et d’agir rapidement », a déclaré le président Zuma . « Nous nous sommes engagés… que nous allons être prêts à faire partie de la solution pour aider la République centrafricaine de revenir à sa normalité. » Mais avec l’approche des élections de 2014, il est peu probable que le Président Zuma risque la vie de ses soldats dans une autre mission à l’étranger.
Malgré les terribles avertissements de génocide et de la détérioration de la situation dans le pays, le peuple Centrafricain est susceptible d’être abandonné à son sort. Il semblerait que seulement un massacre à l’échelle du Rwanda pourrait vraiment mobiliser la communauté internationale, déjà préoccupée par la Syrie, le Mali, la Tunisie et tout le reste de l’agenda mondial. Mais cette fois, personne ne sera en mesure de faire valoir que la sonnette d’alarme n’a pas été déclenchée.
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