Au Québec de mars à avril on célèbre le temps de sucre. Cette coutume qui traverse les époques se voit donner un nouvel élan avec des Afro-québécois qui s’approprient, embrassent inéluctablement des traditions de la Belle Province. C’est ce que l’on a pu apercevoir, hier, le 16 mars 2019 alors que la Cabane à sucre Jean-Renauld & Fils à St-Eustache accueillait à bras ouvert une clientèle presque exclusivement antillaise. Konpa, reggae et hip-hop se sont mêlés au traditionnel rigodon.
Cette journée survoltée ou les billets étaient disponibles sur la nouvelle plateforme Ennery, nous la devons à Ralph Jean-Pierre de GoodLife Productions, un promoteur/DJ accompli qui compte dix années d’expérience dans le domaine du divertissement. « En 2017 ce fut la première édition du Sugar Shack. » nous confie fièrement Ralph plus connu sous le pseudonyme Mr. Boom. Le DJ qui a déjà mixé aux cotés de la légendaire Spinderella du groupe Salt n Pepa poursuit, sans attendre : « La cabane à sucre comme tout le monde le sait est une tradition québécoise. Nous, on a amené une touche de notre communauté, notre vibe. C’est ce qui fait que c’est un grand succès! »
L’idée de cette fusion des genres revient à Frantz jr. Pierre de Spotlight Entertainment qui depuis déjà un an, plus hardiment depuis décembre 2018, buche sur cette date qui accueillait plus de 500 personnes, très majoritairement d’origine haïtienne, à la cabane à sucre. « L’idée est que j’aime ça l’ambiance, la réunion, que tout le monde se rassemble, que le monde puisse se parler. Même si on ne se connait pas, on s’assoit à une table et à la fin de la soirée, on peut être en mesure d’avoir une communication avec l’autre. »
Comme les Haïtiens se font toujours un devoir d’arriver tard, vers 20h, après que le beurre et le pain furent déjà installés sur les tables, les participants à cette journée arrivèrent enfin dans la cabane à sucre en activité depuis 1957. Les bouteilles de rhum accolées au mythique sirop d’érable, dont le Québec produit 72% de la production mondiale, se sont mis à trôner au milieu des tables. A coté, le menu classique: des érablières composé de la fameuse soupe aux pois, des oreilles de crisse, des cretons, crêpes, jambon et omelette.
La Comedy Édition, comme nous précise M. Pierre fut supporté par Goofy Welldone, Renzel Dashington et Jmjelie. Le maitre de cérémonie de cette « Cabane à sucre des Blacks… ouverte à tous » comme le martela l’extravagant Goofy Welldone que l’on peut apprécier plus crument sur son Snapchat, cumule ses présences sur la scène québécoise où il anime plusieurs événements du genre. Courtisant maintenant les Français, il s’est retrouvé à l’Ivress d’Humour Comedy Club et au Paname. Cet exil annoncé est imposé s’il souhaite perdurer dans son métier pense-t-il: « Au Québec, dans la télévision québécoise francophone, il n’y en a pas de place pour le Black.» L’humoriste et comédien s’explique : « Il y a zéro Black à la télévision francophone québécoise. Là, quand je dis ça, les gens vont dire ‘ ahhh Goofy t’exageres’. Alors moi je dis OK, il y a 0,7 % de Blacks, et ça c’est une réalité… À l’international il y a plus de débouchés. »
Son compère, Renzel Dashington, 20 années dans le spectacle, fondateur des Bads Boys du rire en ajoute aux inquiétudes de Goofy Welldone « La culture de l’humour québécois est une culture d’humour qui fonctionne par elle-même et ne sens pas le besoin de nous inclure. » C’est ce regard qui amena Renzel a formé le collectif d’humoristes montréalais, Les Bads Boys du Rire. Ainsi, il offre un open mic tous les mercredis à 8h au Petit Agrikol, le bar flanqué au coté du restaurant haïtien Agrikol cofondé par Regine Chassagne du groupe les Arcade Fire dans une soirée gratuite au centre-ville de Montréal ou les amateurs peuvent savoir s’ils ont l’étoffe d’un ou d’une humoriste. Lors de cette cabane à sucre, Renzel Dashington raconta une histoire « bien rodée » d’un Noir s’adonnant au jogging avant que Goofy ne fasse participer la foule à des jeux plus farfelus les uns que les autres.
Quant à la jeune foule de plus de 500 âmes, ces Québécois, d’une ou deux générations pour une écrasante majorité, elle a pu festoyer joyeusement dans cette coutume canadienne datant du 19e siècle, sur du zouk, konpa, reggae et des airs de rigodon bien poussé par les DJ amusés. Pas d’animosité, que des rires, de vives échanges, des chants et de la danse dans cette veillée particulière à la cabane à sucre située à St-Eustache sur la rive nord de Montréal.
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