Paradoxal, mais bien réel, le jour de la proclamation des résultats est un véritable lendemain de veille, une douche froide pour les derniers idéalistes.
Récemment, le triomphe de Paul Biya au Cameroun, avec un « score africain » de 71 % des voix, vient rappeler aux plus naïfs d’entre nous que les élections dans bons nombres de pays africains ne sont qu’un dîner de cons, ou si vous préférez une formule moins grossière, une marche santé pour de millions d’électeurs.
Au pays de Roger Milla, le principal challenger du président sortant, le Dr Maurice Kamto, réclame timidement sa victoire par des vidéos diffusées sur le net, où l’avocat de formation plaide sa cause, documents à l’appui, prenant la communauté internationale pour jury.
Son dircab durant la campagne présidentielle, le très bouillant Paul Éric Kingue, n’a cessé de crier sur tous les toits que 32 procès-verbaux, représentants 1 300 000 votes, n’ont jamais été signés, sont donc illégaux.
Que de guerres lasses, que de prêches dans le désert. Comment gagner un procès lorsque le jury est corrompu, et que l’accusé et le juge sont blanc bonnet, bonnet…
Nous nous retrouvons ainsi devant cette question que se posait Lénine : que faire?
Une interrogation désormais panafricaine, tellement elle trotte dans l’esprit de plusieurs devant une injustice semblable.
Non loin du Cameroun, en R.D. Congo cette fois, le président sortant Joseph Kabila, lui aussi, rit dans sa barbe grisette. C’est qu’il prépare le coup du siècle : il ne briguera pas un troisième mandat, mais compte bien installer son propre YesMan au Palais de la Nation. En effet, au soir du 23 décembre, jour de la 3e élection de l’histoire du pays, le pouvoir congolais tentera de faire avaler à ses concitoyens qu’ils ont voté massivement pour son dauphin, Emmanuel Shadary. Un monsieur qu’ils ne connaissaient pas il y a à peine trois mois, un technicien au charisme d’une feuille morte.
Les opposants politiques les plus sincères savent au plus profond de leur conscience qu’en cas de hold-up électoral, leurs recours sont limités. Très souvent, si la communauté internationale s’en mêle, c’est qu’on ne pourra payer la facture sans y laisser une partie de son âme.
Les politiques sont donc devant un cul-de-sac. Mais, dans cette route du désespoir, la rue reste le joker de ce jeu dangereux, la rue peut faire halte aux grands de ce monde, la rue peut bloquer le chemin aux ivres du pouvoir.
Parce que nul n’est au-dessus de la loi, la rue peut se faire justice.
Dans cet écosystème cynique, comme la nature, la rue reprendra ses droits.
À l’instar des cités en France, je sens que mon Afrique va craquer.
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