Aux élections générales de 1948, la victoire inattendue du Parti national, parti alors exclusivement afrikaner, entraîne la mise en place d’une nouvelle politique de ségrégation connue sous le nom d’apartheid. Dans ce système, le rattachement territorial puis la nationalité et le statut social dépendent du statut racial de l’individu, défavorisant largement la population noire et interdisant les mariages mixtes.
En 1955 a lieu le congrès du peuple, qui adopte la « Charte de la liberté » qui donne les bases fondamentales du mouvement antiapartheid. Pendant cette période, Nelson Mandela et son ami Oliver Tambo dirigent le cabinet d’avocats Mandela & Tambo qui fournit un conseil juridique gratuit ou à bas coût pour les nombreux Noirs qui ne peuvent payer les frais d’avocats.
Le 21 mars 1960 a lieu le massacre de Sharpeville, un ghetto de Vereeniging, dans le sud du Transvaal. Lors d’une manifestation du Congrès panafricain contre l’extension aux femmes du passeport intérieur, que les hommes noirs soient obligés de porter constamment sur eux sous peine d’être arrêtés ou déportés, une soixantaine de policiers sur un effectif total de trois cents hommes retranchés dans un local de la police et appuyés par des véhicules blindés tirent sans sommation sur une foule d’environ cinq mille personnes. Il y a soixante-neuf morts, dont huit femmes et dix enfants, ainsi que cent quatre-vingts blessés, dont trente et une femmes et dix-neuf enfants. La majorité des blessures par balle sont faites dans le dos sur une foule en fuite et non armée. Selon les policiers, les tirs ont été dus à la panique et à l’inexpérience à la suite de jets de pierre, mais la Commission de vérité et de réconciliation a conclu que les tirs étaient délibérés.
La stratégie non violente de l’ANC est alors abandonnée par Nelson Mandela, qui fonde en 1961 Umkhonto we Sizwe (MK) qui se traduit par « fer de lance de la nation ». Une branche militaire prônant l’action armée. En mai 1961, il lance avec succès une grève générale où les grévistes restent à leur domicile, obligeant le gouvernement à faire intervenir la police et l’armée.
Nelson Mandela favorise le sabotage, qui « n’entraîne aucune perte en vie humaine et ménage les meilleures chances aux relations interraciales », avant de s’engager dans « la guérilla, le terrorisme et la révolution ouverte ». Un membre de l’ANC, Wolfie Kadesh, explique la campagne de sabotage à la bombe menée par Mandela : « […] faire exploser des lieux symboliques de l’apartheid, comme des bureaux du passeport interne, la cour de justice pour natifs, et des choses comme ça… Des bureaux de poste et… des bureaux du gouvernement. Mais nous devions le faire d’une façon telle que personne ne fût ni blessé ni tué. »
Mandela collecte aussi des fonds à l’étranger pour le MK et organise l’entraînement paramilitaire du groupe. Il suit une formation militaire en Algérie nouvellement indépendante et étudie Carl von Clausewitz, Mao Zedong, Che Guevara et les spécialistes de la Seconde Guerre des Boers. En raison de cet engagement militaire et de la qualification de l’ANC comme « organisation terroriste », Nelson Mandela ainsi que plusieurs autres responsables politiques de l’ANC ne pourront entrer aux États-Unis sans visas spéciaux jusqu’au 1er juillet 2008.
Après son retour en 1962, Mandela a été arrêté et condamné à cinq ans pour avoir organisé une grève et d’avoir quitté le pays illégalement. Tacher de terroriste par ses ennemis, Mandela a été condamné à la prison à vie en 1964, isolé de ses millions de ses frères qui comme lui a souffert de l’oppression, de la violence et du régime d’apartheid de la ségrégation raciale.
Il a été incarcéré à Robben Islande, une colonie pénitentiaire au large du Cap , où il passera les 18 prochaines années, avant d’être transférés dans des prisons du continent. En 1964, la résistance se retrouve décapitée. Les attaques armées de MK en territoire sud-africain cessent et ne reprendront véritablement qu’en 1976. Tandis que les pays du Commonwealth prennent leur distance, le gouvernement sud-africain, loin d’être sanctionnés, profite des années de prospérité économique pour encourager l’immigration européenne et développer son industrie et son armement avec l’Allemagne et la France, avec le soutien des États-Unis au nom de la lutte contre le communisme.
Mandela était derrière les barreaux quand un soulèvement a éclaté dans l’immense ghetto de Soweto en 1976. En septembre 1977, Steve Biko, fondateur du Mouvement de conscience noire meurt torturé en prison par la police. Moult violences ont éclaté dans les années 1980 par le MK. Le régime devait négocier.
En février 1985, le président Pieter Willem Botha offre à Nelson Mandela, contre l’avis de ses ministres, la liberté conditionnelle en échange d’un renoncement à la lutte armée. Mandela rejette l’offre, disant dans un communiqué transmis par sa fille Zindzi : « Quelle liberté m’est offerte alors que l’organisation du peuple demeure interdite? Seuls les hommes libres peuvent négocier. Un prisonnier ne peut pas faire de contrat. »
Pendant toute la durée de l’emprisonnement de Nelson Mandela, la pression locale et internationale sur le gouvernement sud-africain se fait toujours plus forte. Incarcéré il reçoit le prix prix Ludovic-Trarieux pour son engagement en faveur des droits de l’homme.
Quand il a été libéré le 11 février 1990, s’éloignant de la prison Victor Verster main dans la main avec sa femme Winnie, l’événement a été retransmis en direct par les télévisions du monde entier. Le jour de sa libération, Nelson Mandela fait un discours depuis le balcon de l’Hôtel de Ville du Cap. Il y déclare son engagement pour la paix et la réconciliation avec la minorité blanche du pays, mais annonce clairement que la lutte armée de l’ANC n’est pas terminée.
Après sa libération, Nelson Mandela fait un voyage à Cuba lors duquel il rencontre Fidel Castro. Le 26 février 1990, il demande à ses partisans : « Jetez dans la mer vos fusils, vos couteaux et vos machettes », afin de pacifier les relations entre l’ANC et le gouvernement, mais aussi la rivalité entre l’ANC et l’Inkhata zoulous qui a fait de nombreuses victimes.
Au cours des quatre prochaines années, des milliers de personnes sont mortes dans la violence politique. La plupart étaient des Noirs tués dans des combats entre partisans de l’ANC et les Zoulous fidèles au Parti de la liberté Inkatha de Mangosuthu Buthelezi .
Mandela a empêché une explosion raciale après l’assassinat du chef populaire du Parti communiste sud-africain et chef militaire du MK, Chris Hani par un assassin blanc en 1993 par un appel au calme dans une allocution télévisée sur les ondes nationales. Cette même année, Nelson Mandela et Frederik Willem De Klerk, le dernier président Blanc d’Afrique du Sud… ont conjointement reçu le prix Nobel de la paix.
Nelson Mandela a fait de la réconciliation le thème de sa présidence. Il a pris le thé avec ses anciens geôliers et conquis de nombreux Blancs quand il a enfilé le maillot de l’équipe nationale de rugby d’Afrique du Sud – un symbole de la suprématie blanche – lors de la finale de la Coupe du Monde en 1995 au stade Ellis Park de Johannesburg.
Cette même année Mandela établit la Commission Vérité et Réconciliation. Présidée par Mgr Desmond Tutu, cette commission enquête sur les crimes de l’apartheid des deux côtés et tente de panser les plaies. Cet exercice a également fourni un modèle pour d’autres pays déchirés par la guerre civile.
Nelson Mandela ne manque jamais de saluer les pays qui ont soutenu la lutte contre l’apartheid comme la Jamahiriya arabe libyenne du colonel Kadhafi qu’il qualifie de « leader moral » ou « frère leader » et auquel il décerne l’ordre de Bonne Espérance en 1997, la plus haute distinction du pays.
À l’intention de ceux qui désapprouvent ces visites, comme le département d’État américain, il réplique qu’ils « n’ont pas de morale » et que « cet homme les a aidés en un temps où nous étions seuls, quand ceux qui disent que nous ne devrions pas être ici aidaient l’ennemi ». C’est au colonel libyen que Nelson Mandela avait accordé sa première visite à l’étranger d’homme libre en 1990 et c’est à lui en premier qu’il rend visite une fois élue en 1994. Le colonel Kadhafi sera le dernier chef d’État qu’il recevra en visite officielle à la fin de sa présidence en 1999.
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