La bataille d’Adoua est livrée près du village d’Adoua, au cœur de la région du Tigré, dans le nord de l’Éthiopie, le 1er mars 1896. Elle oppose les forces de l’Empire éthiopien du Negusse Negest Menelik II à celles du Royaume d’Italie dirigées par le colonel Baratieri. Elle achève, par la victoire des Éthiopiens, la première guerre italo-éthiopienne et clôt un XIXe siècle marqué par les diverses tentatives de pénétration en Éthiopie menées par les puissances coloniales.
Le Royaume d’Italie, qui achève son unité en 1861, entre relativement tard dans la course à l’Afrique ; il s’implante en Afrique de l’Est le 15 novembre 1869, lorsque la Società di Navigazione Rubattino achète la baie d’Assab au sultan local. Le 5 juillet 1882, le gouvernement italien prend le contrôle du port d’Assab par décret puis, trois ans plus tard, du port de Massoua et s’étend vers l’intérieur; la colonie d’Érythrée est formée le 1er janvier 1890. Durant les années 1880, l’Italie acquiert également divers territoires sur la côte du Benadir auxquels elle impose un protectorat le 3 août 1889. Elle cherche ensuite à accroître son influence en envahissant l’Éthiopie en 1895-1896
En 1889, Ménélik II conquiert plusieurs provinces et se déclare empereur d’Éthiopie. Il signe alors un traité avec les Italiens rédigé en deux langues : la version en italien établit un protectorat italien sur l’Éthiopie, tandis que la version en amharique affirme uniquement l’existence d’un partenariat entre les deux pays, l’Éthiopie conservant sa totale indépendance.
En 1893, Ménélik met fin au traité. Les Italiens commencent un certain de nombre de campagnes militaires. Plusieurs batailles s’en suivent, jusqu’à la bataille d’Adoua qui marque la défaite italienne.
Les affrontements entre l’Éthiopie et l’Italie qui suivent la dénonciation du traité, débutent à la fin de l’année 1894, lorsque Bahta Hagos, un Dejazmach d’Akkele Guzay en Érythrée, entre en rébellion contre l’ordre colonial. En janvier 1895, les Italiens engagent les hostilités à la bataille de Coatit contre le Ras Mengesha, gouverneur du Tigré, fils de Yohannes IV. À la suite de leur victoire, ils occupent de larges parties du Tigré, à Adigrat, Mekele et Amba Alagi .
En Éthiopie, un appel à la mobilisation générale contre les forces coloniales est lancé le 17 septembre 1895. En l’espace de deux mois, une centaine de milliers de soldats sont rassemblés en des points stratégiques du pays (Addis Ababa, Were Ilu, Ashenge, et Mekele) . Les forces éthiopiennes se dirigeant vers le nord du pays et la région du Tigré rencontrent une position fortifiée italienne, à Amba Alagi. Accompagné des troupes du Qegnazmach Tafesse, le Fitawrari Gebeyehu lance une attaque, désobéissant ainsi aux ordres. Le 7 décembre 1895, les forces italiennes et un renfort de 5 000 soldats sont chassés et mis en déroute. La poursuite de la marche vers les positions italiennes s’effectue alors dans l’anticipation constante d’une confrontation.
Gebre Selassie, présent sur la champ de bataille, chroniqueur de la cour éthiopienne, auteur d’un récit sur le règne de Menelik II, constitue la principale source écrite éthiopienne.
Le 1er mars, vers 5 h 00 du matin, les Italiens lancent la première offensive, inattendue, et s’approchent de l’entrée du camp éthiopien, surveillée par 500 hommes de garde. Ras Mengesha Yohannes, alors responsable des troupes, organise la défense ; après un échange de coups de feu, les Éthiopiens capturent et interrogent deux prisonniers afin qu’ils divulguent la stratégie des Italiens. Celle-ci consiste à déclencher l’offensive sur les positions éthiopiennes alors que de nombreuses troupes sont parties en quête de nourriture.
En outre, les Éthiopiens apprennent la progression des cinq généraux italiens : quatre passant par l’Enda Gerima et le cinquième empruntant la direction de Mariam Shewito. Un éclaireur rapporte l’information au Qegnazmatch Tafesse, ce dernier alerte Menelik qui demande s’il s’agit là de la véritable bataille amorcée par les Italiens (le Negusse Negest se refuse à attaquer le premier). Ayant reçu une réponse affirmative, il envoie Bejirond Ketema et la Garde montée afin de confirmer cette information, ordonne à tous les soldats de préparer leurs armes et se place en costume de bataille devant sa tente. Pendant ce temps, Ras Mikael et ses troupes rejoignent la bataille ; les deux tiers des troupes éthiopiennes étant au ravitaillement, les autres soldats s’avancent vers le front, suivis plus tard par Menelik.
Peu après, la colonne de Taytu Betul, épouse du Negusse Negest, se met en place avant d’affronter les Italiens ; elle est accompagnée du clergé axoumite, de l’arche de Sainte-Marie et de l’Abune Matewos. Après ses prières, voyant l’arrière flanc reculer, elle encourage les soldats à poursuivre la bataille pour ensuite y participer activement avec ses troupes. Son artillerie, placée à sa droite, se met à bombarder le milieu du corps de troupes italien; la progression s’effectue au son des chants des prêtres priant saint Georges et la principale bataille est finalement remportée par les Éthiopiens.
A la suite de cette victoire, les brigades menées par Menelik entament les opérations de nettoyage pendant lesquelles ils se trouvent confrontés à une nouvelle division ennemie : de nombreux Italiens périssent et les quelques survivants s’enfuient, le premier flanc italien est défait. Les renforts éthiopiens continuent d’arriver sur le champ de bataille jusqu’à 11 h 00, alors que les soldats du Negusse Negest franchissent une colline derrière laquelle se trouvent 2 000 soldats italiens et indigènes qui demandent grâce. Taytu arrive ensuite à l’endroit où la première victoire a eu lieu, ses servantes offrent de l’eau aux blessés éthiopiens et italiens. Vers 15 h 00, des Éthiopiens reviennent avec des blessés et des prisonniers, Taytu leur ordonne de regagner le front et de ne revenir que lorsque le Negusse Negest en décidera. L’ordre est transmis aux divers fronts par l’impératrice et sa sœur, Woyzero Azaletch Betul. Gebre Selassie rend d’ailleurs hommage au rôle que les femmes ont joué pendant la bataille : « Nous ne pourrions décrire tous leurs exploits car ce qu’elles ont fait ce jour-là a dépassé ce que l’on attendait d’elles. »
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