Pourquoi les modèles démocratiques du continent noir restent-ils muets?
En mai dernier, la communauté internationale incarnée essentiellement par les puissances occidentales a fermé les yeux sur la grande pagaille électorale mise en scène par le parti au pouvoir à Addis-Abeba, l’Eprdf (Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien). Le 28 juin prochain, les maîtres du monde vont une nouvelle fois être muets devant la volonté manifeste du pouvoir burundais d’organiser une élection présidentielle non crédible. Quand l’Occident dit « oui » aux violations des droits de l’Homme en Afrique, pourquoi les nations du continent à même de donner des leçons de démocratie aux autres États ne disent-elles pas « non »?
Début 2009, contrairement à la décision de l’UA (Union africaine) de ne pas appliquer le mandat d’arrêt international lancé par la CPI (Cour pénale internationale) à l’encontre du président soudanais Omar El Béchir, le Botswana a clairement affirmé qu’il serait prêt à arrêter et à livrer le leader du plus grand pays d’Afrique à la CPI.
Déjà en 2003, le président nouvellement élu du Kenya (Mwai Kibaki, archétype du bon démocrate africain à l’époque) avait dénoncé sans ambages la nouvelle victoire d’Eyadèma Gnassingbé du Togo lors de la présidentielle qui avait lieu cette année-là au Togo. Le journal gouvernemental togolais avait piqué une grande colère à l’époque en qualifiant dans un éditorial « d’ardeurs d’un néophyte » les déclarations de M. Kibaki.
Les positions précitées de Nairobi et Gaborone sont rares en Afrique, mais n’ont plus été dupliquées par d’autres bons élèves de la démocratie sur le continent berceau de l’humanité. Est-ce par souci de préserver les relations de bon voisinage entre frères d’un même continent, ou par nécessité de respecter la coutume du « droit d’aînesse » en Afrique? Une chose est évidente; les Africains ne pourraient indéfiniment continuer à cautionner les écarts de démocratie de leurs frères, car ils sont ceux qui font le plus usage du dicton, « le linge sale se lave en famille » !
Plus les habitants du continent le plus pauvre du monde trouveront des voies et moyens pour aseptiser les plaies immondes qui ulcèrent le visage de l’Afrique, mieux ils seront respectés et craints par les puissances du Nord, leurs ex-colonisateurs qui s’adonnent toujours à cœur joie, depuis de longues décennies, au néocolonialisme… « Quand nous serons unis, cela va faire mal, quand nous serons unis, cela va faire mal, comme les États-Unis, cela va faire mal », avait averti le reggaeman ivoirien Tiken Jah Fakoly dans l’un de ces derniers albums en date. Une unité qui passe avant tout par la vérité que les Africains doivent se dire mutuellement sur les insultes à l’intelligence humaine que sont les farces de processus électoraux mises en branle dans diverses régions d’Afrique.
L’Afrique du Sud (première puissance politique et économique d’Afrique) doit à titre d’exemple, être à même, de remonter les bretelles aux dirigeants burundais et rwandais qui s’apprêtent à plonger leurs États respectifs dans une crise politique dont leurs concitoyens n’ont nullement besoin, au moment où ils recherchent les moyens d’épaissir quotidiennement leurs tirelires. Boni Yayi et John Evans Atta-Mills, dans le même sillage, doivent avoir le courage de dire haut et fort à leur pair Faure Gnassingbé du Togo que son pays a aussi besoin de la même dose de vertus démocratiques qui ont permis au Bénin et au Ghana d’être aujourd’hui de presque parfaits modèles démocratiques! Non seulement en Afrique de l’Ouest, mais aussi sur le continent africain tout entier. Certes, les réalités politiques et économiques des pays d’Afrique varient d’une région à une autre, mais il faudra nécessairement passer par la case V-E-R-I-TE!!
Une problématique qui relance indirectement la sempiternelle question de la légitimité des dirigeants d’Afrique pour réaliser la gageure décrite dans les lignes antérieures. Car mieux vous disposez de la légitimité dans la peau de dirigeant, plus vous avez la latitude de prendre des décisions audacieuses.
États vertueux d’Afrique, vous n’êtes certes pas nombreux, mais les prochaines générations du continent noir ne vous pardonneront pas vos complicités directes ou indirectes vis-à-vis de la kyrielle des inconduites qui déjantent et sabotent le développement de plus d’un milliard d’âmes… D’autant plus que sur les cinq continents de la planète, l’Afrique est le seul qui héritera dans les prochaines décennies, selon les démographes, d’une population jeune.
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