En Haïti, le Constituant 1987, hanté par le passé, mais ne s’inscrivant pas dans la troisième vague de la démocratisation, a établi le mandat présidentiel à deux mandats non successifs, mandat qui est donc décalé dans le temps. Or, cet acte ne représente aucunement une rationalisation du fait politique haïtien; fait politique qui est miné, depuis l’assassinat de l’empereur Jacques 1er, le 17 octobre 1806, par l’intransmission des pouvoirs d’État.
La fin de la guerre froide, la transition et la consolidation démocratiques qui l’accompagnent vont se heurter à l’épaisseur du régime despotico-anarchique , qui consiste à prendre le pouvoir au moyen des insurrections, à en être chassé par une « contre-insurrection », dans le cadre de la médiation d’un gouvernement provisoire, qui assume la passation d’un gouvernement « constitutionnalisé » à un autre.
Le Blanc débarque à nouveau, des Latinos s’embarquent aussi, en fétichisant, dans la conjoncture de la mondialisation, la démocratie représentative, même si les États-Unis, depuis 1915, 100 ans, n’ont jamais pu jouer un rôle moteur dans l’acculturation démocratique; ce qui est, en principe, inconcevable : la souveraineté de la citoyenneté ne peut pas ne pas s’autodéterminer.
L’intervention multilatérale n’arrive pas à atterrir, car les pistes n’ont pas été construites par des classes sociales en lutte pour l’hégémonie. Le Président haïtien Jean-Bertrand Aristide a subi deux coups d’état; et paradoxalement, c’est sous sa présidence qu’un embargo fut adopté à l’encontre du peuple haïtien. Par ailleurs, son successeur le Président René Préval ne s’est pas préoccupé à instituer la transmission des pouvoirs constitutionnalisés. Or, c’est son institutionnalisation qui fait problème.
La stratégie de ce président sortant, en fin de mandat, réside à faire jouer en sa faveur l’imbroglio du Constituant 1987, en recourant délibérément aux fraudes électorales, ne pouvant exercer aucun pouvoir de convocation sur la majorité de la population. L’indique le faible taux de la participation citoyenne aux élections générales qui se déroulent présentement.
L’astuce se donne à voir ainsi : en mobilisant le tout pour le tout en vue de faire élire son dauphin qui, lui, va lui retourner l’ascenseur, et ainsi de suite, ils accumulent respectivement leur mandat constitutionnalisé. Le risque de l’instabilité politique est fort probable. Cette tactique ne saurait remplir la fonction d’un parti dominant dans le cadre du pluralisme politique. On ne sort pas du régime politique traditionnel qu’est le despotico-anarchique.
[blockquote author= »Constitution de la République d’Haïti – 29 mars 1987″ pull= »pullleft »]Article 134.3: Le Président de la République ne peut bénéficier de prolongation de mandat. Il ne peut assumer un nouveau mandat, qu’après un intervalle de cinq (5) ans. En aucun cas, il ne peut briguer un troisième mandat.[/blockquote]
Ainsi est-il fort difficile d’énoncer la mise en œuvre de la transition et de la consolidation démocratiques; mise en oeuvre qui se trouve avec le maternage démocratique, en acte depuis la fin de la présidence à vie.
Pis, la nouvelle opposition ne demeure pas en reste. Lavalas-au sens d’un mouvement largement large- ne s’est pas constitué en parti dominant, qui lui aurait permis de baliser le passage du régime despotico-anarchique à la démocratie représentative. Elle est donc coincée. Boycotter ou y aller aux élections présidentielles, frauduleuses, mais où elle dispose , en se regroupant, la majorité du suffrage exprimé. Elle souffre stratégiquement d’une méconnaissance de la réalité haïtienne à devoir transformer. Ce déficit , organisationnel, s’il n’y est pas comblé, va aggraver considérablement une sortie de crise durable.
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