Quelque chose de surprenant est arrivé au Nigeria dimanche dernier : L’économie a presque doublé, accumulant des centaines de milliards de dollars, gonflant son économie vers celle de la Pologne et de la Belgique. Elle est devenu du jour au lendemain la plus importante d’Afrique, déclassant l’Afrique du Sud.
Durant les 24 dernières années, la méthode de calcul du produit intérieur brut (PIB) du Nigeria n’avait pas été réformée. Cette réforme, les pays riches l’appliquent généralement tous les cinq ans. Chose que le gouvernement nigérian a finalement entreprise. Le PIB, la valeur de tous les biens et services finis du marché a explosé à 510.000.000.000 $ (510 G$) et la dette a fondu de 19 % du PIB à 11 %.
Pour célébrer l’occasion, le Bureau national de la statistique du Nigeria a publié un document PDF aux aspects plutôt ludiques qui définit le changement et nouvelle classification économiques (re-benchmarking) de chacun de ses secteurs d’activités.
La nouvelle évaluation nigériane soulève deux questions distinctement liées. Premièrement : Que manquons-nous sur les pays où nous n’avons pas de données économiques précises à leur sujet et quelles sont les implications de cet aveuglement?
Pendant toutes ces années, dans le calcul de son PIB, incroyablement le Nigeria ne prenait pas en compte des secteurs économiques en plein essor comme le cinéma et les télécommunications. L’industrie du cinéma nigérian, Nollywood, génère près de 600 millions de dollars par année et emploie plus d’un million de personnes, ce qui en fait le deuxième plus grand employeur du pays après l’agriculture.
Quant à l’industrie des télécommunications, il y a maintenant quelque 120 millions d’abonnés de téléphonie mobile au Nigeria, sur une population de 170 millions. Le Nigeria et l’Afrique du Sud sont les plus grands marchés mobiles en Afrique subsaharienne, et l’utilisation du téléphone portable a détoné dans le pays :
Intégrer les industries du film et de télécommunications dans le PIB du Nigéria a provoqué une énorme différence dans le secteur des services, ce qui rend l’économie du pays non seulement plus fort, mais plus diversifié.
Avec ce constat, plusieurs économistes avancent l’idée que l’Afrique dans son ensemble n’est pas aussi pauvre que nous avons longtemps pensé. On peut étendre ce cas à d’autre pays tel Haïti, imputer d’être la nation la plus pauvre du monde. Pourtant, la faim y existe, mais non la famine.
Le PIB ne comptabilise pas ou comptabilise de manière approchée un certain nombre d’éléments pourtant réels. Parmi les éléments les plus importants, on peut citer :
- L’autoproduction (ou autoconsommation) de richesses. Certaines productions sont créées et consommées au sein même des ménages, sans passer par aucun échange de type marchand : par exemple, la production domestique (fruits ou légumes récoltés dans le jardin familial) ou les activités domestiques assurées par les mères de famille ou les femmes au foyer (cuisine, ménage, courses, entretien familial, etc.).
- Le travail au noir est mal mesuré : sa valeur ajoutée est incluse dans le PIB sur la base d’estimations.
- Le bénévolat, qui est un service non marchand, est également très mal mesuré : sa valeur ajoutée est comptabilisée essentiellement à partir des coûts de personnel.
- La contribution réelle des services non marchands et de l’administration publique à la production économique pose également problème : en l’absence de facturations, il est délicat de chiffrer ce type de services. Pour contourner cette difficulté, la pratique est de les comptabiliser dans le PIB selon la convention que leur valeur est égale à leur coût.
Dans de nombreux pays africains, asiatiques et latino-américains, les calculs du PIB ne tiennent pas compte des phénomènes tels que la mondialisation, ou la révolution de la téléphonie mobile. Il y a des faiblesses fondamentales dans la collecte de statistiques de base telles que le type d’entreprises, ce qu’ils vendent, ou dans quels biens et services les ménages dépensent leurs revenus. Les enquêtes nécessaires pour recueillir ces informations ne sont effectuées que trop rarement.
Lorsque le Ghana en 2010 a évalué son PIB sur de nouvelles bases, il a bondi de 60 pour cent, transformant instantanément un pays « à faible revenu » pour un pays « à revenu moyen- inférieur ». Les organisations humanitaires utilisent ces catégories pour déterminer les niveaux d’aide financière. John Campbell du Council on Foreign Relations ou CFR, un think tank non partisan américain fondé en 1921 ayant pour but d’analyser la politique étrangère des États-Unis et la situation politique mondiale, souligne que le PIB récemment recalculé, le Nigeria peut désormais revendiquer une appartenance à des groupements politiques comme le G-20, le BRICS, et même le Conseil de sécurité de l’ONU.
Mais tout cela nous amène à la deuxième question : Sommes-nous trop obsédés par le PIB comme mesure de la force et de la santé économique du pays? La révision du PIB de cette semaine rendra probablement les investisseurs et les entrepreneurs plus confiants au Nigeria.
De nouvelles bases de calculs du PIB nigérian sont déjà prévues pour 2016…
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