Le 1er août 1834, le Le Slavery Abolition Act de 1833 devint Loi. Il y a 186 ans, les afro-descendants réduits en esclavage dans les colonies britanniques aspiraient à la liberté. Les Noirs ont vite compris que cette pseudoliberté était conditionnelle. Seuls les enfants noirs de moins de 6 ans seraient libres. Pour les autres, ils n’étaient plus esclaves, mais ils se transforment en de serviteurs non rémunérés, travaillant au moins 40 heures semaine. Ainsi, la journée de l’émancipation de 1834 jette les bases de nombreuses luttes que les Noirs auront à livrer.
Pendant que nous poursuivons cette marche, nous devrions nous poser deux questions: Un: Pourquoi marchons-nous? Et deux : Quelles mesures prenons-nous?
Commençons par le pourquoi maintenant?
La réponse complexe commence par un traumatisme racial. Mondialement, bien avant le meurtre de George Floyd aux États-Unis, les Noirs ont été assassinés et certains de ces meurtres atroces ont été causés par les forces de l’ordre. Ici même au Canada, il y a des centaines de victimes noires qui ont perdu prématurément la vie aux mains des forces policières. Mais le traumatisme ressenti en voyant un humain perdre la vie lentement pendant 8 minutes a fait déborder le vase. Cette exécution en direct fut un signal de fumée pour les Noirs. C’était un horrible rappel de notre traumatisme que nous voyons et vivons tous les jours. Les Afro-Canadiens ne sont pas libres. Le symbolisme du Jour de l’Émancipation est ici plus important que jamais.
Maintenant, nous exigeons notre liberté. Cette marche pour l’émancipation n’est pas terminée. Oui, physiquement, nous sommes libres, mais nous devons émanciper notre également existence. Avec l’augmentation des protestations pour le Black Lives Matter, nos pieds sont sur l’accélérateur. Nous marchons et conduisons vers notre pleine liberté.
La deuxième question: quelles mesures prenons-nous?
À Montréal, la prochaine étape est l’émancipation de l’espace Noir. Les Afro-Montréalais ressaisissent leurs espaces et l’un de ces espaces se trouve être le Negro Community Centre, affectueusement connu sous le nom de NCC. Le NCC a été créé en 1927, sous la direction du révérend Charles H. Este, pasteur de l’Église Unie de l’Union. L’Église elle-même a une histoire et un lien formidable avec la communauté noire de Montréal.
La programmation du NCC était axée sur les besoins éducatifs et récréatifs des enfants et des adolescents. Diverses activités et services ont été offerts au fil des ans, dont une garderie, des camps d’été, des cours de danse et de musique, des programmes parascolaires, un programme pour les aînés et des cours de langue. En fin de compte, c’était un espace Noir pour les Noirs. Notamment, la NCC a accueilli Nelson Mandela lors de sa visite à Montréal en 1990, et plusieurs personnalités connues mondialement ont également fréquenté assidument le centre, dont Oscar Peterson et Oliver Jones.
Malheureusement en 2014, face à une faillite, l’organisation de la NCC a vendu le terrain à Paul Sen Chher, un promoteur immobilier, pour la somme de 300 000 $. Quelques mois plus tard, la NCC a été démolie. Cependant, le site reste zoné comme patrimoine culturel. Et maintenant les Afro-Montréalais veulent récupérer leur espace. Ils veulent construire leur histoire et y replanter leurs racines pour leurs avenirs.
Alors, ils l’ont fait. Le 1er août, le comité de la NCC a lancé le Long Walk Home. Les Afro-Montréalais veulent récupérer cette terre. Récupérer cette terre, c’est avoir un endroit où les Noirs peuvent être culturellement libres. Ainsi, une centaine de Montréalais se sont rassemblés à la Place d’Youville, au même endroit où se sont rendus leurs ancêtres en 1834. La communauté est arrivée prête à marcher 2,5 km jusqu’au site historique du Negro Community Center. Cette solidarité démontre que cette marche essentielle pour défendre un espace d’Afro-descendants n’est pas terminée
Samedi, le premier aout 2020, les Noirs ont marché pour démontrer que les actions des Noirs comptent. Ce sont les premiers pas qui culminent une longue marche de revendications. Les Afro-Canadiens ne seront plus divisés selon les lignes coloniales jadis de la langue, du français ou de l’anglais. Ils s’unissent plutôt en une seule communauté. Alors qu’ils marchaient pacifiquement du Vieux-Montréal à la Petite Bourgogne, vous pouviez entendre les voix de l’émancipation. Des voix de gens investis de leur pouvoir, agissant selon leurs désirs pour dessiner leur avenir.
À mesure que la destination se matérialisait au parc Oscar Peterson, l’Histoire se revivifiait. Oliver Jones, musicien de jazz de renommée mondiale et ancien résident de la NCC, a clairement indiqué lors de sa prise de parole: » This is our place! And for many this is their home, in both their hearts and minds. (Ici, c’est à nous! Et pour beaucoup, c’est leur maison, à la fois dans leur cœur et dans leur esprit) »
Le Negro Community Centre, une halte d’une marche longue de 186 années pour notre émancipation amène forcément les Noirs vers leur pleine liberté : une émancipation de nos esprits, cœurs et âmes.
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