La traite des noirs qu’a subie l’Afrique pendant près de 4 siècles, la colonisation qui l’a suivie et le néocolonialisme contemporain sont souvent brandis en Afrique comme étant les causes profondes des maux qui bloquent actuellement le développement du continent le plus pauvre du monde ! Toutefois, à la faveur de la célébration du jubilé des « indépendances africaines », une introspection « des tropiques noirs » s’impose!!!
Certes, la voie à suivre pour parvenir à un renouveau dans la « Noirosphère » (ensemble des communautés noires du monde) sera encore parsemée de nombreuses embûches.
Mais l’essentiel n’est-il pas, dès à présent, de se mettre à l’œuvre pour permettre au cours des prochaines décennies à nombre d’États sous «les tropiques noirs» de ressembler à de rares modèles exemplaires comme l’Afrique du Sud, l’île Maurice, les Seychelles, le Botswana, la Tunisie moins sa dictature, le Malawi, le Mozambique, le Ghana, le Cap-Vert? Certes aussi, comme le dit Anne-Cécile Robert (journaliste au Monde Diplomatique) dans son ouvrage L’ Afrique au secours de l’Occident (paru en janvier 2004 aux Éditions de l’Atelier),
« si les élites africaines ont été et demeurent des agents de ce drame historique, leur responsabilité s’inscrit dans un cadre dessiné par d’autres et implacablement imposé par toute une série d’institutions. Armé de deux redoutables instruments de contrainte dont il a la maîtrise quasi exclusive –l’argent et le droit, le libéralisme mondialisé dicte, administre, sanctionne : Pas (Programme d’ajustement structurel), «conditionnalités» de l’aide, règles de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) ».
Toutefois, poursuit la journaliste du Monde Diplomatique, « la spécificité de l’Afrique réside, d’une part, dans la gravité particulière des dégâts que ce système dévastateur y a occasionné et, d’autre part, dans l’ancienneté de la domination subit. La mondialisation libérale devient ainsi le prolongement logique de l’exploitation coloniale. L’occidentalisation se poursuit avec un acharnement aussi aveugle que criminel. Le fait qu’on désigne cette occidentalisation par le terme de «mondialisation» en dit d’ailleurs long sur l’impérialisme ». Car, conclut l’auteur de L’Afrique au secours de l’Occident, « en uniformisant les règles économiques, la mondialisation déstructure les sociétés et porte atteinte à cette diversité des cultures. En l’espace de 20 ans, le continent noir a subi des mutations que les sociétés développées ont parfois mis 150 ans à effectuer. Par exemple, l’explosion des villes ».
Mais les descendants de victimes d’esclavage et de colonisation que sont les « Blacks » doivent désormais faire sienne cette citation de Kofi Yamgnane : « La vraie et grande question qui commence à se poser est celle-ci : comment se fait-il qu’avec toutes les catastrophes qui leur tombent dessus, il y ait encore des Africains? Ces 750 à 800 millions d’hommes, de femmes et d’enfants, pourquoi ne meurent-ils pas tous ? C’est que le malade est coriace (…) », in Nous grandirons ensemble, 2002. À ce titre, rappelait Boubou Hama (1906-1982, écrivain et homme politique nigérien), « le plus grand bien que l’Afrique peut apporter à notre commune humanité dans l’angoisse est son grand retard, celui-là même qui manque à l’Occident industriel pour devenir humain ». Une logique qui remet indirectement sur le tapis la question de la légitimité des dirigeants d’Afrique, et surtout de leurs aptitudes et propensions à enclencher des réformes idoines dont la finalité est de permettre à leurs peuples d’échapper à « l’occidentalisation » à outrance sus-décrite du monde. Ou du moins contribuer à ce que l’Afrique apporte à cette « occidentalisation » sa part de vérité! C’est à ce niveau que se situe également l’importance de la célébration du jubilé des « indépendances africaines ».
Le néocolonialisme a joué une part importante dans la survivance des maux qui minent actuellement le continent noir. Mais, rejeter tout le retard de l’Afrique vis-à-vis des autres continents sur l’héritage précité du colonialisme serait faire preuve de paresse intellectuelle. En effet, les Républiques d’Afrique qui s’efforcent tant bien que mal d’échapper au cycle infernal de la pauvreté ne vous diront pas qu’elles n’ont jamais continué à subir diverses formes de pression de la part de leurs ex-colonisateurs après leur indépendance. Ces Républiques qui se distinguent dans le lot des échecs en Afrique vous diront plutôt qu’elles ont bâti le début de leurs réussites sur leurs efforts d’affirmation singulière dans un monde globalisé.
Exemple du Cap-Vert qui a opté pour un régime présidentiel dans le lot des régimes semi-parlementaires qui existent en Afrique de l’Ouest, un plagiat incorrect du régime politique en vigueur en France. Le choix capverdien semble faire mouche dans la mesure où Praia est à l’abri des mélodrames et différends politiques qui secouent l’Afrique occidentale depuis plusieurs années. Alors même que le Portugal qui est l’ancienne puissance colonisatrice de Praia pratique un régime parlementaire !
Avec la célébration du jubilé des « indépendances africaines », l’Afrique doit donc faire le deuil d’un certain nombre de plagiats de modèles socio-politiques européens pour prendre son destin en main… S’affirmer au reste du monde envers et contre tous est loin d’être une erreur ou un péché dans le monde contemporain mondialisé à outrance. Une telle affirmation est aussi une attitude de rejet des nouvelles formes contemporaines des funestes Pas (Programmes d’ajustement structurel) !!!
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