L’ambition d’une jeune écolière malgache de 16 ans que l’on nommera ici Paula est d’ouvrir une boutique de vêtements après avoir terminé un cours collégial en design textile, mais en attendant, avec huit de ses amis, elle s’est tournée vers la prostitution pour payer ses frais de scolarité. Elle demande 7 $ US pour un moment avec elle, et travaille dans la banlieue pauvre d’Antananarivo, la capitale économique et politique de Madagascar dont la population dépasse 1 600 000 habitants.
« La raison pour laquelle j’essaie de faire de l’argent est parce que mes parents sont en difficulté financière. Ils ont des difficultés et je peux les aider. C’est moi qui paie mes frais de scolarité depuis que j’ai 13 ans. J’ai eu peur, mais j’ai fait un effort en raison de problèmes d’argent de mes parents », déclare-t-elle. «La plupart d’entre elles [mes amis] sont comme moi, ils s’occupent de leurs parents [à travers le travail du sexe]», dit-elle.
Des preuves anecdotiques de l’augmentation du nombre de travailleurs du sexe et de l’itinérance croissante à Antananarivo, la capitale de Madagascar, fournissent un indice de la descente du pays vers une pauvreté plus présente.
En mars 2009 Andry Rajoelina destitue le président Marc Ravalomanana avec l’aide de l’armée et l’imposition de sanctions internationales, l’annulation des accords commerciaux et le retrait de l’aide internationale font grimper les indicateurs sociaux de pauvreté. Les travailleurs sociaux et de santé font état d’une « inquiétante » augmentation du niveau des travailleurs du sexe, en particulier chez les enfants qui utilisent cet outil pour payer leurs études. Une ONG locale, Ankanifitahiana (Famille de Dieu), qui offre une éducation aux enfants issues de familles défavorisées ou encore orphelins, rapporte une augmentation de l’achalandage.
« J’ai toujours un peu peur, continue Paula, mais la chambre que je loue pour 5 $ par jour est sécuritaire ». Malgré l’utilisation de préservatifs, elle est préoccupée par le fait qu’elle pourrait devenir enceinte, comme cela est arrivé à une de ses collègues de classe. Près de la moitié des 60 $ par mois qu’elle gagne sert à payer ses frais de scolarité. Le reste, elle le donne à ses parents, qui pensent qu’elle travaille comme serveuse. Ses deux parents ont perdu leur salaire de 50 $ par mois après la fermeture d’usines textiles.
Environ 150.000 personnes dans la capitale qui travaillaient directement et indirectement pour les usines de textile ont perdu leur emploi à la suite de l’annulation des États-Unis de l’adhésion du pays Africain au African Growth and Opportunity Act (AGOA), le 31 décembre 2009, après le putsch d’Andry Rajoelina un homme d’affaires malgache et ex-maire.
Cette union, qui date de mai 2000, représente un intérêt réciproque pour les deux parties, les pays africains ayant ainsi la possibilité de s’affirmer progressivement sur la scène mondiale en entrant dans la Mondialisation, et les États-Unis bénéficiant ainsi d’une nouvelle source d’approvisionnement, notamment en pétrole… L’AGOA, a soutenu près de la moitié de l’industrie du textile malgache de 600 millions de dollars en 2008, a donné au pays un accès aux marchés américains.
Selon Hanitra Rakotoarimanga qui gère un centre de santé dans un quartier pauvre de la ville, dit qu’en mars 2011, le Ministère de la Santé a mené une enquête sur la prévalence du VIH et a recruté 300 travailleurs du sexe afin de les tester pour le VIH/sida, et c’est à partir de ce moment qu’ils ont remarqué qu’il y avait une augmentation d’au moins 30 % de nouveaux cas chez les travailleurs du sexe.
Les femmes de plus de 18 bénéficient d’une carte médicale spéciale qui leur permet d’avoir accès à des tests de dépistage des maladies transmissibles sexuellement et des préservatifs gratuitement. Le personnel du centre a également spécifié qu’il travaille de plus en plus avec de jeunes filles mineures « hors livres ».
Le Groupe Développement Madagascar (GDM, une ONG luttant contre l’exploitation sexuelle des enfants) a indiqué que dans un récent sondage sur 129 travailleuses du sexe le nombre d’enfants augmente. GDM cible les enfants de familles pauvres, mais a observé que des filles de familles de classe moyenne se tournent également vers le travail du sexe. A Isotry, les travailleurs du sexe demandent aussi peu que 25 cents US ou tout simplement contre une assiette de riz, tandis qu’au centre-ville les prix se fixent à 12 $.
Bernadette Ramanantohasa, une femme de 47 ans, a travaillé en tant que travailleuse du sexe dans Isotry depuis qu’elle est devenue une veuve en 2002. Son défunt mari travaillait dans une école primaire et gagnait 7,50 $ par mois pour leurs 11 enfants, dont quatre sont morts de maladies liées à la diarrhée. La prostitution rapporte à la veuve environ 15 $ par mois. Quatre de ses adolescentes sont également devenues des travailleuses du sexe.
« Maintenant vous rencontrez toute sorte de personnes dans ce milieu parce que nous avons toutes besoin d’argent. Vous trouverez même des enfants de 10, 12 et 13 ans.», spécifie-t-elle.
Olivier De Schutter un rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation du Conseil des droits de l’homme à l’Organisation des Nations unies et spécialiste des Nations unies a déclaré lors d’une récente visite à Madagascar que les sanctions sur le pays devraient être réévalué. « La situation est extrêmement préoccupante et doit interpeller la communauté internationale parce que l’une des raisons pour lesquelles ce pays est sur le bord d’une crise humanitaire majeure est que les sanctions ont ralenti gravement la vie économique du pays ». Le taux de pauvreté a augmenté de 9 % entre 2008 et 2010, selon une étude des ménages réalisée par l’ONU tous les cinq ans.
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