Le Black feminism (en français « féminisme Noir ») est un mouvement féministe né aux États-Unis dans les années 1960-1970, lors du mouvement des droits civiques. Il se caractérise par la volonté d’associer ensemble les critiques du sexisme et du racisme, et d’élaborer un point de vue spécifique tant bien à l’intérieur du mouvement féministe que du mouvement du nationalisme noir.
Le nationalisme noir, souvent désigné sous le terme anglais Black nationalism, est un terme générique regroupant une série d’idéologies affirmant l’unité fondamentale des populations africaines ou d’origine africaine.
Selon Elsa Dorlin, maître de conférences à Paris-I et auteur de l’introduction de Black feminism Revolution ! La Révolution du féminisme Noir ! (L’Harmattan, 2007), la première anthologie, en français, de textes de ce mouvement…
« L’expression Black feminism, traduite dans les textes par « féminisme Noir », recouvre la pensée et le mouvement féministes africains-américains en tant qu’ils diffèrent du féminisme américain « en général », précisément critiqué et reconnu pour son « solipsisme blanc », héritier malgré lui de la fameuse « ligne de couleur » produite par les systèmes esclavagiste, puis ségrégationniste ou discriminatoire, encore à l’œuvre dans la société américaine contemporaine. Au contraire des textes, si le titre de ce volume a gardé l’expression Black feminism en l’état, comme provisoirement intraduisible, c’est qu’il nous a semblé important de présenter d’abord le féminisme africain-américain dans la spécificité de l’histoire politique d’où il a émergé, de maintenir dans sa langue sa force d’interpellation, face à une société anglo-saxonne clivée par le racisme : « White woman, listen ! » – « Femme blanche, écoute ! ». Le féminisme Noir a représenté une véritable révolution politique et théorique pour l’ensemble des féminismes nord-américains et, dans une moindre mesure, européens. »
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Le Black feminism trouve ses origines dans un malaise au sein du mouvement des droits civiques et du mouvement féministe nord-américain lors des années 1970. En effet, il revendique un point de vue particulier des femmes afro-Américaines à la fois sur le féminisme en général, et sur les luttes contre la ségrégation raciale. En tant que tel, le Black feminism n’est pas limité aux femmes afro-Américaines: dès ses origines, il inclut des femmes chicanas (Mexico-Américaines), orientales, etc. Il est plutôt caractérisé par la volonté de lier ensemble les problématiques du sexisme, du racisme et de l’oppression de classe.
L’un des textes pionniers du mouvement est publié en 1969 par Mary Ann Weathers: An argument for Black women’s liberation as a revolutionnary force (Un argument pour la libération des femmes noires comme force révolutionnaire) critique l’oppression commune de toutes les femmes, qu’elles soient blanches, noires, porto-ricaines, mexicaines, riches ou pauvres, etc.
L’année d’après, la Third World Women’s Alliance (Alliance des Femmes du Tiers-Monde) publie le Black Women’s Manifesto (Manifeste des Femmes noires), dans lesquelles elles affirment l’existence d’une spécificité de l’oppression dirigée contre les femmes noires. Co-signé par Gayle Linch, Eleanor Holmes Norton, Maxine Williams, Francs Beal et Linda La Rue, le manifeste, qui s’oppose tant bien au racisme qu’au capitalisme, affirme:
« La femme noire demande une nouvelle gamme de définitions de la femme, elle demande à être reconnue comme une citoyenne, une compagne, une confidente et non comme une vilaine matriarche ou une auxiliaire pour fabriquer des bébés. »
Le Black feminism développe le concept d’intersectionnalité, appelé à un avenir prometteur dans la Troisième vague féministe (année 1980). Il souligne l’existence d’enjeux spécifiques aux femmes noires, ignorées par le mouvement féministe dominé par les Blancs. Ainsi, Angela Davis, proche du Black Panther Party, montre qu’alors que les Afro-américaines étaient victimes d’un programme de stérilisations contraintes, les femmes blanches étaient contraintes aux avortements clandestins. La Brigade des femmes du Weather Underground, un groupe radical blanc proche du Black Power, organisa d’ailleurs un attentat, le 6 mars 1974, contre les locaux du HEW (Département de la Santé et des Services sociaux) à San Francisco, exigeant que les femmes gèrent elles-même l’organisation et dénonçant les stérilisations contraintes des femmes de couleur pratiquées par le HEW.
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