Hier, mardi, le 21 avril 2021, les forces armées tchadiennes ont stoppé le pays en annonçant qu’Idriss Déby, 68 ans, était décédé des suites de blessures subies alors qu’il dirigeait des soldats en première ligne contre les rebelles avançant du nord vers la capitale, N’Djamena. « Le président de la République, chef de l’État, chef suprême des armées, Idriss Déby Itno, vient de connaître son dernier souffle en défendant l’intégrité territoriale sur le champ de bataille ».
Troquant l’habit militaire pour la cravate, Idriss Déby a dirigé le Tchad pendant plus de 30 ans. L’allié des puissances occidentales a fait face à plusieurs rébellions et était de plus en plus considéré comme un dictateur puisqu’en avril 2021, Idriss Déby est réélu Président du Tchad avec 79,32 % des voix, après avoir « écarté, légalement ou par la violence et l’intimidation, les ténors d’une opposition divisée », écrit le journal français Le Monde qui va même étiqueter cette exercice de « mascarade démocratique de plus ».
Sur le champ de bataille, Idriss Deby n’était pas en terre inconnue et pourtant c’est sur le champ de bataille que l’ancien soldat rencontre finalement sa fin.
Originaire de l’ethnie Zaghawa, Idriss Déby, de confession musulmane comme la moitié des Tchadiens, a grandi dans la région nord-est de l’Ennedi. Il a rejoint l’armée au début des années 1970, à un moment où le Tchad était en proie à une longue guerre civile. Idriss Déby a reçu une formation militaire supplémentaire en France en 1976.
Devenu commandant en chef des forces armées, Idriss Deby est arrivé au pouvoir en 1990 en dirigeant, avec l’aide précieuse des services de renseignement français et le soutien de la Libye et du Soudan, une rébellion qui a renversa le Président Hissène Habré, lui-même investit par un coup d’état en 1982.
Idiss Déby a officiellement pris ses fonctions en février de l’année suivante en transformant son mouvement armé en parti politique. Idriss Déby remporte les élections en 1996 et à nouveau en 2001 avant de faire passer un changement constitutionnel en 2018 qui aurait pu lui permettre de rester au pouvoir jusqu’en 2033.
Idriss Deby, Président de l’Union Africaine en 2016, était considéré comme un allié clef des puissances occidentales pour la lutte internationale contre les groupes armés en Afrique de l’Ouest et du Centre. Sous ses ordres, les troupes tchadiennes sont devenues la principale force régionale dans la bataille contre les groupes liés à l’Etat Islamique et à Al-Qaïda dans la partie occidentale du Sahel et Boko Haram dans le bassin du lac Tchad.
Chez lui, Idriss Deby a été constamment confronté à la menace de groupes rebelles qui tentaient de le renverser. Les rebelles ont atteint la capitale en 2018 et 2019. Les forces du président les ont combattus, avec l’aide de la France qui des airs, conforta ainsi artificiellement le trône du Président en bombardant les positions rebelles.
Le soulèvement le plus récent a commencé le jour des élections le 11 avril 2021, lorsqu’Idriss Deby demande un sixième mandat controversé après un vote boycotté par les principaux partis d’opposition. Alors que les résultats des élections commençaient à affluer, des membres du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT), un groupe rebelle basé en Libye composé en grande partie de dissidents de l’armée, ont traversé la frontière nord de la Libye vers le Tchad. C’est dans cet épisode qu’un membre du FACT aurai donné la mort au Président tchadien.
Son fils de 37 ans, né le 1er janvier 1984, le général quatre étoiles Mahamat Idriss Deby, dirigera désormais un conseil militaire de transition pendant 18 mois avant la tenue de nouvelles élections, a annoncé l’armée. D’ici là, le jeune dauphin est le nouveau Président du Tchad et régnera sur 16 millions de Tchadiens.
L’ancien Président Déby et ses proches se sont considérablement enrichis. Les fameux Panama Papers indiquent que le « clan » au pouvoir a détourné 10,76 milliards de dollars pour les placer dans des paradis fiscaux tandis que les très faibles investissements dans les services publics (écoles, centres de santé, etc) maintiennent l’immense majorité de la population dans une grande pauvreté.
[blockquote author= »Saleh Kebzado leader historique de l’opposition tchadienne en 2017″ pull= »normal »]En soutenant financièrement à bout de bras un régime comme celui du Tchad, ne l’encourage-t-on pas à persister dans la faute, pour continuer à traquer ses citoyens, à voler, à tuer et à piller impunément? Comment peut-on et pourquoi doit-on octroyer une aide budgétaire à un régime qui excelle dans la prédation et qui ne fait pas d’effort pour s’amender ? 10,7 milliards de dollars, c’est la somme tracée par Panama Papers dans des paradis fiscaux, bien plus que les 7 milliards d’aide publique promis à la table ronde de Paris en septembre dernier […] Jusqu’à quand vont-ils continuer de soutenir un régime, un homme, contre la volonté de tout un peuple?[/blockquote]
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