Le cancer, c’est comme une mauvaise loterie. On remporte le gros lot lorsque l’on s’y attend le moins. Il frappe sans aucune discrimination de genre, d’âge et d’origine culturelle. Lahissa en sait quelque chose. À cinq ans, cette fillette au sourire contagieux a frôlé la mort.
C’était le 2 juin dernier. Ce que sa mère Mélissa confondait pour une vilaine poussée dentaire accompagnée d’une fièvre s’est plutôt avérée une leucémie aiguë lymphoblastique. Cette maladie est provoquée par une prolifération anormale de globules blancs (lymphocytes) dans la moelle osseuse.
« Tout ce que j’ai vu, c’est CANCER, CHIMIO, DÉCÈS !», s’exclame la jeune femme. Une réaction normale pour tout parent qui reçoit ce coup de massue en plein coeur. Heureusement, les médecins de l’Hôpital Sainte-Justine,un centre hospitalier universitaire à vocation pédiatrique à Montréal, étaient confiants. Car dans sa malchance, Lahissa était « chanceuse ». Le pronostic de guérison de ce type de cancer chez les enfants est très bon.
Depuis, l’Hôpital Sainte-Justine est devenu leur seconde maison. Ou peut-être ex-aequo avec celle des grands-parents de Lahissa. C’est quand même grâce à son grand-papa que sa vie fut sauvée in extremis. Avec le ton, la fermeté et l’attitude non-négociable que plusieurs reconnaitront en leurs parents haïtiens, Mélissa s’est pliée à la menace de son père : « Lahissa a l’air malade. Si tu ne l’amènes pas à l’hôpital, c’est moi qui le ferai !!! ».
Une menace qui aura valu tout son pesant d’or.
Barbiers unis contre le cancer
L’histoire de Lahissa et de sa famille reflète celle de milliers de gens dont la vie bascule du jour au lendemain. La cuisine de l’Hôpital Sainte-Justine regorge ainsi de mamans – surtout – qui concoctent avec amour des plats pour leurs trésors, en espérant que ceux-ci pourront en manger une cuillérée ou deux en dépit de la douleur et de la fatigue.
Les épices asiatiques côtoient alors celles de la Méditerranée, de l’Afrique, des Antilles, du Maghreb et j’en passe.
Beaucoup semblent l’oublier, mais des enfants de toutes origines souffrent dans les quatre murs de nos hôpitaux. Toutefois, les dons provenant des Québécois issus de cette même diversité n’affluent pas. Un défi auquel Leucan, une organisation canadienne sans but lucratif qui favorise le mieux-être et la guérison des enfants atteints de cancer, s’est attaqué en lançant, la semaine dernière, la première édition de l’innovatrice campagne « Barbiers contre le cancer ».
« La santé des enfants, l’affaire de tous »
La formule est simple : une quarantaine de barbiers de Montréal et Laval reconnus pour leur art se sont mobilisés afin de recueillir des fonds pour les enfants malades. À l’issue du concours, un barbier sera élu « Barbier le plus artistique » et un autre, « Barbier le plus généreux ».
Réhul Design, PrettyBoy Barbershop, Queen of The World, Andies Barbershop, Quality Cuts et Notorious Barbershop font partie de ceux et celles – car oui, il y a des femmes – qui apportent leur talent et leur réputation auprès de leur fidèle clientèle au profit d’une cause qui cherche à diversifier le profil de ses donateurs.
« Malheureusement, les campagnes philanthropiques ne sont traditionnellement pas réfléchies et orientées vers les communautés culturelles », souligne Alexandra Jeanty, directrice régionale de Leucan Montréal-Laval. « Par exemple, le Défi têtes rasées et le Défi Ski 12 h Leucan peinent à rejoindre cette clientèle », reconnait la gestionnaire entrée en poste il y a quelques mois.
Ainsi, qu’ils soient d’origine haïtienne, jamaïcaine, latino-américaine, juive, italienne ou sud-asiatique, les barbiers participant à ce mouvement contribuent à créer une adéquation entre le public que Leucan dessert et celui qui donne. « Je suis aussi très fière de ce projet puisque, habituellement, quand on pense à ‘barbier’, on pense à ‘Movember’ et ‘prostate’, et non à ‘cancer pédiatrique’ », explique Mme Jeanty.
[blockquote author= » » pull= »pullright »]Pour encourager un barbier participant à la campagne, rendez vous au www.barbierscontrelecancer.com et cliquez sur FAIRE UN DON. Notez que le volet CONCOURS de cette campagne est terminé.[/blockquote]
Leucan désire désormais interpeler la diversité dans son ensemble, incluant la communauté LGBT. « La santé des enfants, c’est l’affaire de tous », plaide-t-elle.
Leucan, un « soutien inestimable »
Cette vision, Mélissa la partage totalement. « J’ai toujours fait des dons à Leucan, sans savoir, qu’un jour, ma fille serait malade », souligne-t-elle, saluant au passage le « soutien inestimable » de l’organisme dans sa vie et celle de Lahissa. Aide financière, appels à la maison, visites à l’hôpital, massages. « Ils chouchoutent les parents et les enfants. L’encadrement est béton. Tu n’es pas un numéro », insiste la mère. «Ils sont là, on dirait des gens de la famille qui vivent le diagnostic avec nous.»
Un avenir prometteur pour Lahissa
Malgré les nombreux traitements, les rechutes, les périodes de découragement, Mélissa entretient l’espoir que sa fille aura une jeunesse normale. « Lahissa est en rémission. Elle n’a plus de trace de cancer dans son sang», se réjouit-elle, précisant que sa battante poursuivra ses traitements pendant deux ans et demi « afin de s’assurer que le méchant est parti une fois pour toutes. »
« Quand les gens me demandent : ‘Comment tu fais ?’ Je leur réponds qu’outre ma famille, la personne qui m’aide le plus, c’est Lahissa elle-même… »
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