Poète solaire de la Négritude, Aimé Césaire implante des mots qui éclairent comme un réverbère dans la nuit moite d’une soif de liberté insatiable des peuples noirs endurcit par un calvaire voilé.
C’est lui, ce Martiniquais qui en 1939 inventa ce mot puissant « Négritude ». Un terme palpable dans sa littérature noire ou Crainte et Désir s’unissent et réclament l’émancipation d’un peule, son peuple, enchaîné dans un calvaire indigne.
Né le 26 juin 1913, le Nègre fondamental meurt, il y a aujourd’hui dix ans, le 17 avril 2008 à Fort-de-France en Martinique.
Essayez de compléter cet extrait de Les Armes miraculeuses écrit par ce poète martiniquais en 1946 en glissant les mots au bon endroit.
Le rebelle (dur)
Mon nom: offensé; mon prénom: _______ ; mon état: révolté; mon âge: l’âge de pierre.
La mère
Ma race : la race humaine. Ma religion: la _______ .
Le rebelle
Ma race: la race tombée. Ma religion… mais ce n’est pas vous qui la préparerez avec votre désarmement… c’est moi avec ma révolte et mes pauvres _______ serrés et ma tête hirsute.
(très calme) Je me souviens d’un jour de novembre; il n’avait pas six mois et le maître est entré dans la case fuligineuse comme une lune rousse, et il tâtait ses petits membres musclés, c’était un très _______ maître, il promenait d’une caresse ses doigts gros sur son petit visage plein de fossettes. Ses yeux bleus riaient et sa bouche le taquinait de choses sucrées: ce sera une bonne _______ , dit-il en me regardant, et il disait d’autres choses aimables le maître, qu’il fallait s’y prendre très tôt, que ce n’était pas trop de vingt ans pour faire un bon _______ et un bon esclave, bon sujet et bien dévoué, un bon garde-chiourme de commandeur, oeil vif et le bras ferme. Et cet homme spéculait sur le berceau de mon fils un berceau de garde-chiourme.
La mère
Hélas ! tu mourras.
Le rebelle
Tué… Je l’ai tué de mes propres mains…
Oui: de mort _______ et plantureuse…
C’était la nuit. Nous rampâmes parmi les cannes à sucre. Les coutelas riaient aux étoiles, mais on se moquait des étoiles. Les cannes à sucre nous balafraient le visage de ruisseaux de _______ vertes. Nous rampâmes coutelas au poing…
La mère
J’avais rêvé d’un fils pour fermer les yeux de sa _______ .
Le rebelle
J’ai choisi d’ouvrir sur un autre soleil les yeux de mon fils.
La mère
…Ô mon fils… de mort mauvaise et pernicieuse
Le rebelle
Mère, de mort vivace et somptueuse
La mère
pour avoir trop _______
Le rebelle
pour avoir trop _______ .
La mère
Épargne-moi j’étouffe de tes liens. Je _______ de tes blessures.
Le rebelle
Et le monde n’épargne pas… Il n’y a pas dans le monde un pauvre type lynché, un pauvre homme torturé, en qui je ne sois _______ et humilié.
La mère
Dieu du ciel, délivre-le.
Le rebelle
Mon coeur, tu ne me délivreras pas de mes _______ . C’était un soir de novembre… Et subitement des clameurs éclairèrent le silence. Nous avions bondi nous les esclaves, nous le _______ , nous les bêtes aux sabots de patience. Nous courions comme des forcenés; les coups de feu éclatèrent… Nous frappions. La sueur et le sang nous faisaient une fraîcheur. Nous frappions parmi les cris et les cris devinrent plus stridents et une grande clameur s’éleva vers l’est, c’étaient les communs qui brûlaient et la flamme flaqua douce sur nos joues. Alors ce fut l’assaut donné à la maison du maître. On tirait des fenêtres.
Nous forçâmes les portes.
La chambre du maître était grande ouverte. La chambre du maître était brillamment éclairée, et le maître était là très _______ .. et les nôtres s’arrêtèrent… c’était le maître… J’entrai. C’est toi, me dit-il, très calme… C’était moi, c’était bien moi, lui disais-je, le bon esclave, le fidèle esclave, l’esclave _______ , et soudain ses yeux furent deux ravets apeurés les jours de pluie… Je frappai, le sang gicla: c’est le seul _______ dont je me souvienne aujourd’hui.
La mère
J’ai peur de la balle de tes mots, j’ai peur de tes mots de poix et d’embuscade. J’ai peur de tes mots parce que je ne peux pas les prendre dans ma main et les peser… Ce ne sont pas des mots _______ . Ce ne sont point des mots que l’on puisse prendre dans la paume de ses mains et peser dans la balance rayée de routes et qui tremble…
(la mère s’écroule)
Extrait de Les Armes miraculeuses, Gallimard 2001
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