Dimanche le 5 mars 2017, le coeur de Montréal allait battre pour la communauté noire. Aussi espéré qu’un messie, le Gala Dynastie qui en est a sa première incarnation, est venu célébrer la talentueuse collectivité afro-québécoise boudée des médias de masse de la belle province.
« Donnez-nous un goddamn show.» sera le cri de victoire de Kevin Raphaël, Influenceur Web francophone de l’année. « Parce que ce que je vois à la télé ne me représente pas!»
Cet étonnant manque de reconnaissance, ce plat désintérêt de l’establishment blanc pour ce qu’est l’authentique communauté noire, avec ses accents, ses positions, se perpétue avec l’instauration de ce Gala devenu nécessaire. Pat Dillon-Moore, Personnalité radio communautaire anglophone de l’année, malgré son absence aura ces mots pour les centaines de spectateurs présents à l’Olympia en cette froide journée d’hiver : « L’encouragement adoucit le travail. » C’est ce qu’allait faire le Gala Dynastie à tout ces gens, qui prennent courageusement leurs places dans un système qui leur est d’abord hostile.
Et quel Gala! Je ne me souviens pas d’avoir vu autant de vedettes du petit et grand écran, de la scène sportive, du micro, du monde des affaires réuni au même endroit. Alors que les médias québécois parleront encore en long et en large du Festival de la poutine, Michel Mpambara, Dorothy Rhau, Gardy Fury, Rickey D., Angelo Cadet, Luck Merville, Vlad Alexis, Duke Eaton, Beverly Salomon, Weil Prosper, Pierre-Yves Lord, Kerlande Mibel , Gilbert Rozon et des dizaines d’autres encore, se sont mêlé naturellement à tous ces Noirs, les premiers supporteurs indéfectibles d’une communauté en mal de modèles, qui ont rempli haut la main la salle de l’Olympia. Au moins 80% de l’assistance était visiblement afro-descendants, majoritairement de noir vêtu.
Un tapis noir accueillait les stars dès 18h00 malgré une coordination nerveuse des organisateurs, passage obligé d’un accouchement inoubliable. Un bon quarante minutes s’écoula avant d’asseoir la foule jubilatoire que les portes ont admises vers 20 h. Le spectacle élaboré par l’omniprésente Carla Beauvais débutait donc vers 20 h 45 par la perçante voix de Stéphane Moraille: I Feeling Good, une chanson standardisée par Nina Simone pimentée de mots créoles par la cantatrice.
Les animateurs de la soirée de gala étaient Gaël Comtois, habillé par un designer au nom italien qui m’échappe, et Cindy Charles qui nous confiera-t-elle « a choisie la garde-robe de son amie pour son vêtement. » Jolie garde-robe par contre. Les deux coanimateurs étaient supportés par DJ Sandy Duperval.
Le premier Trophée Dynastie dans la catégorie de la personnalité radio francophone de l’année tomba entre les mains de Philippe Fehmiu, fils de l’historien Paul Fehmiu-Brown qui lui, reçu le Prix Hommage Dynastie. À la question « Que représente ce trophée pour vous? » Philippe Fehmiu, l’ex-lofteur qui brille aujourd’hui chez Radio-Canada répondit : « Je suis vraiment très, très content, j’en tremble de fierté. Mon émission est une émission moitié musique du monde, moitié musique d’ici. Pour moi c’est le parfait reflet du Québec, le Québec qui fait la promotion de la diversité. La diversité fonctionne. »
Après une performance peu convaincante du chanteur Lukay et ses danseurs/danseuses plutôt désynchronisées, Karim Ouellet remporta le prix de l’artiste francophone de l’année. Longiligne, à la physionomie atypique, ce grand gaillard né au Sénégal, adopté par des Blancs, a de la graine de star… Les flashs se l’arrachaient. Dans son discours d’acceptation où il offrait toutes ces félicitations au Gala, il s’est dit très heureux de recevoir ce prix, lui qui en reçoit peu. Dans un entretien d’une minute avec cet auteur-compositeur-interprète, meilleur album francophone canadien en 2014 pour l’album Fox, il nous confie : « Toutes mes props au Gala Dynastie d’avoir, outre le prix que j’ai gagné, mais encore plus loin que ça, toute cette organisation-là, et le travail qu’ils font. Ça fait longtemps qu’on attend ça, très très longtemps. On a mérité un gala comme celui-là il y a très longtemps déjà. Enfin, quelqu’un a fait le move d’organiser ça comme il faut, de façon très professionnelle. Pour une première édition, c’est quand même génial tout ce qui se passe. » Des mots pleins de sagesse et un appel à l’humilité aux quelques qui trouvaient cet événement trop élitismes et criaient jusqu’au boycottage.
Le plus long discours de la soirée revient aux récipiendaires du premier Prix Hommage Philanthropie du Gala Dynastie. Dans une homélie de plus de 7 minutes, le couple de Vickie Joseph et de Frantz Saintellemy ont tenu à remercier la bruyante foule dans les deux langues officielles. La designer Vickie Joseph, manifestement émue, n’a pu retenir ses larmes.
Puis, vers les 23 h 50, Imposs et sa soeur J.Kyll de l’erratique et toujours populaire groupe Muzion ont démontré leur savoir-faire et ranimé la foule avant qu’Eddy King ne triomphe dans la catégorie de l’humoriste de l’année, un combat très à l’avantage de l’humoriste natif de la banlieue de Paris. À la même question destinée à Philippe Fehmiu, que représente ce prix pour vous?, l’homme au sang congolais, fier représentant de la communauté noire nous répond : « Cela représente beaucoup, parce que c’est un trophée qui vient de ma communauté et d’être reconnu par ma communauté, c’est beaucoup. C’est tes racines, c’est ce que tu es. Autant qu’on peu dire que la communauté ne supporte pas, c’est pas vrai. Il y a beaucoup d’artistes qui se plaignent de cela. Mais les gens de ta communauté, c’est ceux qui parlent plus de toi, c’est ceux qui te valident. Même si monétairement ce n’est pas eux qui s’impliquent, le plus souvent, mais le fait qu’ils te valident cela rajoute de la solidité, de la force dans ta fondation. Et ça, ça me fait plaisir. »
Les médias québécois diront qu’il n’est rien arrivé dimanche, le 5 mars 2017. Mais sachez le premier Gala Dynastie est né et a surpassé toutes les attentes. La barre est haute pour la seconde édition.
Les Interviews ont été réalisés par Nadia Michelot
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